Genomique

Après analyse, le génome d’Ozzy Osbourne

Internet, télévision, radio, l’info c’est du buzz, de la fast-food de l’info. Vite consommé, vite dégéré, immédiat, mais sans la saveur d’un bon plat. Du coup, j’ai cédé à ce pêché, l’annonce du séquençage du génome d’Ozzy Osbourne pour lequel je n’avais donné suite.

 Matériels et méthodes

Cofactor Genomics a construit et séquencé une banque d’ADN génomique à partir de cellules d’Ozzy Osbourne. 39 Gb (milliards de lettres) ont été séquencés, soit une couverture 13x avec un séquenceur Applied Biosystems SOLiD 4. Les analyses ont été réalisées par Life Technologies et Knome sous la direction du Dr Nathan Pearson. Elles consistent en une comparaison avec les génomes disponibles dans la NCBI (National Library of Medicine) ainsi qu’avec la la version 18 du génome humain de référence.

 Résultats

Sur la base de de l’ADN mitochondrial, Ozzy est apparenté à quelques parents célèbres, Stephen Colbert ou Henry «Skip» Gates. L’ADN d’Ozzy a également révélé de petites portions de l’ADN de Néandertal, acquises lors de métissages Néandertal-sapiens. Mais son côté bestial ne vient pas de là, George Church le fondateur de Knome a environ 3 fois plus d’ADN néandertalien que Ozzy.

Niveau drogues, six fois plus de risque de dépendance à l’alcool mais des prédispositions inférieures à l’héroïne ou à la nicotine. Avec plusieurs bouteilles de cognac par jour pendant des années, sans trop en être éprouvé, ça semble compréhensible! Cette capacité à ingurgiter d’importantes quantités d’alcool pourrait s’expliquer par une mutation dans la région régulatrice du gène codant l’alcool déshydrogénase (ADH4), impliquée dans le métabolisme de l’alcool.

La découverte la intéressante concerne le gène comt (catéchol-O-méthyltransférase). Dans son cas, ce gène est dupliqué en deux variants appelés «warrior » et «worrier», «guerrier» et «inquiet». Cette enzyme dégrade la dopamine, l’adrénaline et la noradrénaline. Le variant « guerrier » implique une aptitude à la planification, à l’organisation ou à  la conscience de soi, alors que le variant « inquiet » déprécie ces fonctions.

Bien qu’ayant toujours été un hypocondriaque, j’ai toujours pensé que c’était l’alcool et les drogues qui m’ont fait accomplir toutes ces choses démentes. A certains égards je suis une personne anxieuse et qui manque de confiance. C’est peut-être dans mes gènes car ces deux côtés de ma personnalité me résument parfaitement. Être un guerrier, le Prince des Ténèbres m’a rendu célèbre. Être inquiet m’a gardé en vie alors que certains de mes amis les plus chers n’ont jamais atteint la trentaine.

 Et alors?

Bien que présentés sous la forme d’une publication, ces résultats ne sont que des facteurs de prédisposition, qui plus est issus d’un communiqué de Presse de Knome .

L’environnement, conditionnant l’expression de ce génome, reste un facteur clé de compréhension du vivant. Et parmi les facteurs environnementaux, le microbiote, symbiose que nous entretenons avec notre flore microbienne. Symbiose, bénéfices mutuels, ce ne sont pas des squatteurs mais une source de gène dont notre organisme ne pourrait se passer. Ces vendeurs de rêves de la compréhension du Soi vont certainement lever certains mystères de la curiosité ancestrale de l’homme. C’est beau mais flippant, j’ai peur qu’un jour tout le monde pourrait avoir accès à cette intimité… Les assureurs se frottent déjà les mains ! Des réseaux sociaux ou de rencontre basé sur les affinités possible, je devrais déjà déposer le nom de domaine Genebook.com!

Lorsque le business fricote avec le showbusinees, c’est un tremplin pour le marché de la génomique personnelle qui est en train de prendre son envol; la diminution du coût de séquençage constituant une véritable rampe de lancement. L’augmentation du débit des séquenceurs et la diminution du coût par base surclassent largement la loi de Moore, une illustration ici. Le marché des séquenceurs est en pleine ébullition, les grosses sociétés lancent des OPA pour acquérir les technologies novatrices développées par des startups . Du côté des analyses, trois sociétés sont dans les starting blocks (Knome, Complete Genomics, 23andme), un génome humain coûte aujourd’hui 4998$ mais si vous avez 1000$ ça pourrait être votre cadeau de Noël 2012!

 

Publié par Mathgon dans Sciences, 4 commentaires

Réparer le béton avec des bactéries : BaccilaFilla

Les vainqueurs de l’IGEM, trophée annuel de biologie synthétique, sont des chercheurs de l’Université de Newcastle pour le projet BacillaFilla. Il est basé sur la modification d’une  bactérie de l’espèce Bacillus subtilis, commune dans le sol. Cette bactérie a été transformée afin de remplir les interstices d’une fissure dans le ciment, causée par les violences quotidiennes ou par les tremblements de terre. On ne pense pas assez souvent à tout ce que peut subir ce cher béton, alors qu’il représente tout de même 5% des émissions de dioxyde de carbone anthropiques.

Les  bactéries sont déposées dans la fissure et commencent à se multiplier. Afin de contrôler cette bactérie, les chercheurs ont créée une sorte de coupe circuit génétique afin que la multiplication n’intervienne qu’au pH précis du béton. Elles se multiplient jusqu’à occuper les plus fines anfractuosités de la brèche. Les bactéries « savent » alors que l’espace est rempli par un moyen de communication chimique nommé quorum sensing (et oui, les bactéries parlent!). Le message transmis induitun changement de environnement, certaines bactéries se transforment en filaments, d’autres synthétisent une sorte de colle bactérienne et les dernières se transforment en carbonate de calcium. Une fois durci, le matériau devient  aussi solide que le béton, l’édifice a retrouvé sa résistance structurelle et prolongé sa durée de vie.

BacillaFilla est le genre de biotechnologie, croisé avec la science des matériaux, que nous verront de lpus en plus dans l’avenir. J’ai du mal à imaginer ce que va engendrer la révolution génomique dans les décennies à venir, mais voila en tous cas une bonne base pour une histoire de science-fiction où la bactérie se rebelle et commence à recouvrir la surface du globe de sa matière préférée, jusqu’à coloniser tout l’espace et finir par mourir de sa megalomanie. Ce n’est pas sans rappeler l’excellent La musique du sang de Greg Bear.

Source

Equipe BacilliFila l’Université de Newcastle

(avec photos en microscopie électronique)
Publié par Mathgon dans Sciences, 3 commentaires